Parce qu’il est des personnes, des évènements et des raisons que l’histoire tend à oublier je me permets de vous proposer des séries d’articles pour lever le voile sur ces personnes et événements. Continuons l’épopée de l’incroyable et fabuleuse Alice Marble ?
Alice connait très bien le mépris. Le monde du Tennis américain est une chasse gardé pour les gens de la haute de la côte Est et si les prodiges comme Alice sont autorisés à venir frayer avec les enfants des grands de ce monde, elle sait qu’à leurs yeux elle ne reste qu’une pouilleuse qui vient salir leurs courts. En plus, elle se sait scandaleuse à leurs yeux puisqu’elle à l’audace de refuser de porter des jupes pour jouer, leur préférant les shorts qu’elle juge bien plus confortable.
Mais désormais elle est bien plus qu’une simple pouilleuse : elle est l’élève de cette parvenue de Eleanor Tennant. Car oui, Teach est respectée en tant que joueuse et entraineuse mais elle n’en reste pas moins détestée pour avoir battu des personnes mieux nées qu’elle et pour avoir ouvert le Tennis à ses parasites de Hollywood en échange de menue monnaie.
Lorsqu’Alice reprend le chemin des courts en 1933, après presqu’une année passée à se faire formater par Teach elle va être un véritable rouleau compresseur qui va écraser la concurrence avec 23 victoires consécutives et quelques trophées remportés un peu partout sur son trajet pour la côte Est. L’objectif semble clair : Alice est là pour intégrer la Wightman Cup, la prestigieuse compétition féminine qui, jusqu’en 1989, opposait les meilleures joueuses américaines au fleuron du Tennis féminin britannique.
Pour valider sa candidature elle devra néanmoins passer un test en participant au Maidstone Tournament de Long Island, bastion de l’élite qui n’apprécie pas trop l’arrogance des gens du peuple à vouloir se confronter à leurs supérieurs. Et ça, Julian Myrick, le responsable du tournoi et accessoirement membre du comité de sélection de la Wightman Cup va bien lui faire comprendre.
Lorsqu’Alice découvre son planning elle se rend très vite compte qu’il y a un énorme problème : elle est prévue pour jouer des matches en simples et en doubles consécutivement sur les trois journées du tournoi. Lorsqu’elle demande des explications, Myrick lui répondra :
« Ma chère, vous devez nous prouver votre valeur en nous en faisant la démonstration ici… Alors, peut-être, serez-vous envisageable pour la Wightman Cup… ».
Malgré un coup de fil rageur de Teach, impossible de le ramener à la raison et Alice n’aura d’autres choix que de faire ses preuves.
Les deux premiers jours se passèrent plutôt bien pour Alice qui enchainera les victoires mais vint le dernier jour du tournoi qui commença par la demi-finale en simple opposant Alice à Marjorie Gladman-Van Ryn (Victoire de Alice 6-3, 6-8, 6-1) pour enchainer par la demi-finale en double opposant Betty Nuthall et Mary Heeley à l’aristocratique Ellen Wills Moody et Alice Marble. Ne voulant pas se fatiguer inutilement, Ellen Wills Moody va demander à une Alice Marble déjà éreinté de jouer le plus agressivement possible. Alice, ne voulant pas qu’on la juge indigne de Wightman Cup, donnera le maximum, permettant à son équipe d’arracher la victoire après 3 heures de jeu intensif (6-4, 4-6, 6-1).
Mais la journée était loin d’être fini pour Alice et la température de ce dernier jour de juillet 1933 n’avait fait que grimper pour atteindre les 40°. Elle enchaine directement avec la finale simple qu’elle perdra face à la britannique Betty Nuthall (5-7, 6-3, 6-0) avant d’enchainer directement avec la finale en double qu’elle perdra aussi au profit de Elizabeth Ryan et Peggy Scriven au grand déplaisir de sa partenaire (6-2, 9-7).
Faisons un peu les comptes : ce lundi 31 juillet 1933 Alice Marble aura joué en 9 petites heures consécutives sous un soleil de plomb :
1. 4 matches.
2. 11 sets.
3. 108 jeux.
Malgré deux défaites en final, les preuves sont faites : Alice Marble a tout d’une championne et est clairement digne de la Wightman Cup. Elle quittera le court sous les ovations d’un public en admiration devant son courage et son acharnement mais aussi plein d’indignation face au traitement que le comité responsable de ce tournoi lui a fait subir.
Cette indignation se muera en colère le lendemain matin lorsque le petit monde du Tennis apprendra que le soir même Alice, complètement anémié, a fait un malaise à la suite d’une insolation. Myrick, honteux, ne s’opposera plus à son entrée dans l’équipe américaine pour la Wightman Cup… La médecine s’en chargera à sa place.
À la suite de ce tournoi infernal et au malaise qu’Alice a fait dans la nuit qui s’en suivit elle est très diminuée et les médecins la déclare inapte à concourir pour la prestigieuse compétition entre joueuses américaines et anglaises. Même sur le circuit américain elle peine franchement et, si pourtant elle se hisse de la septième à la troisième place du classement, elle est obligée de prendre du repos.
Pendant plusieurs mois elle va prendre des forces, tout en assistant Teach dans son métier d’entraineuse pour stars. C’est à cette période qu’elle côtoiera le magnat de la presse William Randolph Hearst (qui a notamment inspiré le film Citizen Kane) et qu’elle donnera des cours à ses très nombreux amis d’Hollywood, dont celle qui deviendra une amie proche, l’actrice Carole Lombard.
Néanmoins sa retraite s’avère de courte durée puisque sa troisième place au classement des joueuses US lui permet d’obtenir une invitation pour la fameuse Wightman Cup l’année suivante.
Mais là encore, le sort semble s’acharner sur elle.
Pour promouvoir la Wightman Cup, l’équipe américaine doit participer à une tournée de promotion sur le vieux continent. Le 24 mai 1934, c’est à Paris, sur la terre battue de Roland Garros, que les joueuses américaines viennent faire la démonstration de leur talent.
Alice n’a pas envie de jouer, elle ne se sent pas bien. Et cela depuis plusieurs jours. Elle préfère consulter un docteur qui lui-même lui recommande de ne pas jouer. Mais devant l’insistance de sa camarade Helen Hull Jacobs elle décide néanmoins de participer et elle se lance dans son match contre la française Sylvie Henrotin. Tout se passe bien, elle mène facilement ce premier set. Déjà 4 jeux en poche contre un seul pour son adversaire.
Quand soudain, elle s’écroule.
Les secours arrivent et tentent de la réanimer puis décident de l’évacuer. Elle reprendra conscience lors de son trajet vers les vestiaires. Elle verra la défaite de l’équipe américaine depuis l’infirmerie sous la surveillance de l’équipe médicale.
Elle espère pouvoir reprendre la route et aller jouer la Wightman Cup le 15 juin suivant mais les médecins sont moins confiants. Après plusieurs jours d’examens à l’hôpital américain de Paris, le docteur Dax met fin à ses illusions et pose un premier diagnostic : C’est, selon lui, une pleurésie. Elle a besoin de beaucoup de repos avant de pouvoir reprendre sa carrière.
Mais il se trompe sur un point.
La pleurésie ne fait que cacher quelque chose de plus grave : Alice Marble est atteinte de Tuberculose et c’est un coup d’arrêt définitif pour la carrière de la jeune femme de 21 ans.
Mais il reste sa famille et ses amis.
Mais surtout il reste Teach.
Sa Coach. Sa mentor. Son amie.
Et Teach ne l’abandonnera pas.
Crédits et Bibliographie :
Crédits infos :
Pathé News.
The Billing Gazette 01/08/1933- page 7
The BeeSport 01/08/1933 - Page 1
The Washington Times Herald 25/05/1934 - Page 1
Hollywood Citizen News 06/05/1934 - Page 12
The Oakland Tribune 01/06/1934 - Page 32
The San Francisco Examiner 02/06/1934 - Page 19
The Morning Press 25/05/1934 - Page 10
The Daily Mirror 25/05/1934 - Page 1
Daily News (New York) 25/05/1934 - Page 79
The Los Angeles Times 25/05/1934 - Page 30
Crédits Opening :
SAM SPADE Private Detective - Half Hour Radio Show c.1948 w/ Howard Duff
Superman Radio (Ep269-275) The Silver Arrow ( October 29, 1941)
The Falcon The case of the neighbors nightmare ( February 4, 1951)
Crédits musiques :
Wich side are you ? - UMW Song
Hellhound on my trail - Robert Johnson
My Funny Valentine - Billie Holliday
St James Infirmary - Cab Calloway